Ce qu'il y a de fascinant, dans les entreprises modernes, c'est le besoin constant de communication. Déjà, quand j'étais petit, dans mon école d'ingénieurs, notre professeur de communication (qui menait une double vie d'artiste-peintre) nous contait la communication institutionnelle, la publicité, les entretiens d'embauche, nous préparait à ce champ lexical nouveau pour nous, où les mots ne veulent plus dire grand chose (quand ils existent).
Ainsi donc nous trouvons-nous, par la force des choses, dans une période de communication galopante. Ainsi donc recevons-nous régulièrement un rapport sur l'avancement des différentes activités (internes) liées à la fusion imminente de nos activités (internes et externes). Ecrit par notre groupe de chefs eux-même (ou plutôt leur porte-parole). Une délectation littéraire et une fête polychrome en format PDF. Il n'est point besoin de l'imprimer puis de l'essorer pour se rendre compte que cette bafouille numérique suinte la suffisance. Déjà, sur la page de titre, les mousquetaires nous gratifient d'un sourire de jeune mère devant le premier caca visqueux de sa progéniture toute neuve. Et de renchérir sur les actions actuelles, toutes en meilleure voie, toutes sous contrôle.
Un petit jeu participatif fut organisé pour donner un nom à notre élan commun. Deux consultants de Rottenburg-sur-Gerbe on gagné la considération globale avec un slogan/logo formidable et progressiste, que je tairai ici par pudeur et discrétion. La participation s'arrêta là puisqu'après, il fallait créer et peupler pas moins de douze groupes de travail sur des sujets aussi divers que l'organisation, les ressources humaines et l'intégration interculturelle (les indiens parlent aux chinois). La population fut directe et discrète: tout ce que nos quatre entreprises confondues comptent de porteurs de cravates, notre Who's-Who corporate, se retrouve ici. Chacun sa place de parking et son titre, la grande parade des vainqueurs. Et déjà l'on s'autocongratule, alors qu'au vrai travail effectif ne furent consacrées que 90 minutes dans une première journée de réunion fort médiatisée.
L'on tourne cette page électronique avec un sentiment de vacuité bruyante, le client n'attend pas, lui. Il affronte la crise, lui. Il n'a plus de sous et y réfléchit à deux fois, lui. Période sombre de croissance négative alors qu'au loin sourd la récession. Malheureusement, aucun de nos objectifs actuels n'intègre le développement durable. Je crois que nous sommes en train de passer à côté d'une énorme opportunité. Comme on dit ici.