mardi 8 janvier 2008

La T³

27/12/07 21:01, Les Sables-d'Olonne, France


Ici comme ailleurs, elle est encore là, toujours présente, dans les recoins les plus inattendus. Ces lieux plus ou moins désertés par l’hiver, mais sauvés par le magnétisme océanique devraient, en ces temps ordinaires, plutôt faire l’apologie de la charentaise rembourrée que du porte-jarretelles affriolant. Les maillots de bain échancrés attendent sagement leur tour improbable, ici, ce n’est pas Miami. Pourtant ici, comme partout ailleurs dans le monde, règne la Tyrannie du Téton Turgescent (T³ pour les intimes).

Ce phénomène m’apparut plus clairement cette année, en compagnie de renard crispant. Deviser le long des rues de Munich est une activité contraignante et comme nous ne sommes que des canidés, notre attention se laisse parfois distraire par des choses plus terre-à-terre, les vitrines des magasins et les lumières de la ville (je tairai, par pudeur, le regard des belettes éparses). Une activité purement intellectuelle et contemplative, admirable comme tant d’autres. Et puis devant les magasins de mode adolescente (tant par le public visé que par l’avancement de leur contenu), cette révélation de mannequins plastiques. Car tous féminins, quelle que soit leur matière, leur couleur, leur taille, leur coupe, tous, je vous le dis, ont en commun ce trait fascinant: les tétons turgescents. Erotisme de bazar pointant au travers des pulls de laine, pornographie légère sous les étoffes lascives, révélation troublante sous les chemises de soie.

Ceci ne se limite pas aux magasins « tendance » ou aux boutiques de lingerie fine. Au vu et su de tous, dans les magasins les plus respectables (Leclerc!), des générations de mannequins moulés, taillés de la main perverse d’un esthète libidineux, cachent cet hymne indécent et succulent à la femme fantasmatique. Le bling pour adolescentes, le décolleté de bourgeoise fitness, le tailleur de business woman ou la toile cirée de future grabataire. Ici et là-bas. Sans doute pas à Dubai (qui sait?), mais atlantique ou alpine, parisienne ou bavaroise, toujours se dressera cette extrémité, incongrue et déplacée, étrangère et fascinante.

Les raisons de cette raideur furent discutées, demeurèrent irrésolues. Trop froid lors du moulage? Comment expliquer cette similitude sur des multitudes de modèles différents? Excitation hors de propos? Non plus. A la femme moderne, apparemment, en sus d’une sexualité débridée prônée par Sex & the City et ses pairs, libérée et égale, est conseillé, consciemment ou en-dessus, de se payer le luxe d’une séduction facile et à tous égards diantrement efficace. Pourquoi cette liberté en temps de contradiction puritaine, d’intégrisme et de repli? Peuplades européennes décadentes, votre heure va sonner. Bientôt, oui, bientôt. En attendant cette chute longue et dure, recueillons-nous un instant à cette pensée séduisante car effectivement, si certains vêtements sont beaucoup plus intéressants à défaire, autant s’en faire une idée dès l’achat.

Les mannequins masculins, eux, n’arborent en aucun endroit indiqué une grosseur ostentatoire. Peut-être que pour l’égalité, ce ne serait pas plus mal. En tout cas, j’aimerais avoir un avis féminin et autorisé sur ce phénomène.

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